Un tour vers la droite, un tour vers la gauche.
Un tour vers la droite, un tour vers la gauche.

Kirigiri continuait de faire tourner sa petite cuillère dans son café, ne se décidant guère à le boire - depuis le temps, il avait très certainement refroidi. La joue dans le creux de sa main droite, son coude droit posé sur la table, la détective regardait dans le vide, perdue dans ses pensées. Pensées qui tournaient toutes autour d'une seule et même personne.
L'élève d'élite parieuse, Celestia Ludenberg.

Depuis leur premier jour ici, Kirigiri avait été intrigué par cette demoiselle, et ce pour une raison bien simple. La détective, qui ne savait guère qu'elle en était une, arrivait assez bien à lire les pensées des gens - leurs expressions, leurs mimiques, elle parvenait à tout analyser pour en déduire ce qu'ils avaient en tête.
Mais elle n'y arrivait point avec Celestia. Ce qui était, au fond, normal - en tant que joueuse aguerrie, cette dernière avait développé une expression presque impossible à lire. Mais Kirigiri, pour d'obscures raisons, voulait savoir ce qu'elle pensait. Était-ce de la curiosité ? Voulait-elle s'assurer que Celestia ne planifiait simplement rien de dangereux ? Voulait-elle mieux la comprendre car elle voulait se rapprocher d'elle ?

Les trois étaient très certainement valables. Mais, ne mentons pas : bien que Kirigiri gardait ses distances avec elle, l'observant de loin, lui parlant peu, elle... Elle était, sans l'ombre d'un doute, tombée amoureuse de ce mystère vivant qu'était Celestia Ludenberg. Kirigiri, détective au cœur semblant si froid, éprouvait de l'amour pour la parieuse, c'était un fait. Aussi voulait-elle apprendre à mieux la connaître. La façon la plus simple aurait été de lui parler, évidemment - mais la demoiselle aux cheveux lilas ne savait guère comment l'aborder, de quels sujets discuter avec elle.

Alors elle observait, toujours avec ce sentiment que Celestia Ludenberg cachait quelque chose, quelque chose de sombre. Comme une part d'elle ou de son passé qu'elle désirait dissimuler derrière son doux sourire factice. Kirigiri voulait savoir de quoi il s'agissait, désespérément. Elle se disait que si elle savait, elle pourrait peut-être alors lui en parler, essayer de l'aider avec - gagner ainsi son affection.

Notre détective était un peu bête, au fond.

Et puis elle découvrit la vérité. Que Celestia Ludenberg se dénommait en fait Taeko Yasuhiro. De là, Kirigiri suspecta beaucoup de choses - que Celestia était un personnage fictif façonné par Taeko, pour une raison inconnue. Oui, c'était très sans doute cela - Taeko détestait quelque chose en elle, aussi avait-elle décidé de disparaître et de devenir Celestia.

Kirigiri était heureuse de découvrir enfin ce que Celestia cachait.
Mais, elle aurait tant souhaité le savoir plus tôt.
Maintenant, il était trop tard.
L'exécution commençait, la reine des mensonges brûlait.
Kirigiri gardait la tête baissée.
Et puis, des sirènes...

Encore maintenant, lendemain de l'exécution, dans sa chambre, Kirigiri ne pouvait s'enlever cette vision d'horreur de la tête.
Doucement, elle lâcha sa cuillère et, couvrant de sa main gauche ses yeux, elle pleura sans un bruit.